D’après l’Organisation Météorologique Mondiale, 2023 est l’année la plus chaude jamais enregistrée, avec une température moyenne à la surface du globe de 1,45 °C au-dessus du niveau de référence de l’ère préindustrielle. La lutte contre le changement climatique est donc plus que jamais d’actualité.
Dans ce contexte, les entreprises françaises sont de plus en plus sollicitées pour jouer un rôle central dans l’atténuation des émissions de gaz à effet de serre. Par ailleurs la règlementation européenne se renforce à travers la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive).
Face à l’urgence de la situation et à ces exigences croissantes, il devient crucial pour les entreprises de comprendre ces réglementations, d’anticiper les obligations à venir et de s’engager de manière proactive dans la lutte contre le changement climatique.
État des lieux des réglementations
Tout comprendre sur la CSRD et l’analyse de double matérialité. Quelles conséquences pour les entreprises ?
En juin 2021, l’Union Européenne a adopté trois textes majeurs pour renforcer et harmoniser le reporting extra-financier, dont la CSRD. La CSRD marque une avancée importante en imposant aux entreprises européennes une transparence accrue, notamment à travers l’analyse de la double matérialité, qui évalue à la fois l’impact des enjeux ESG (Environnement, Social et Gouvernance) sur la performance financière des entreprises et leur influence sur l’environnement et la société.
La mise en application de la CSRD se fait progressivement à partir du 1er janvier 2024 et s’étendra jusqu’en 2029.
Tout comprendre sur la norme climat de la CSRD : l’ESRS E1
Première ESRS (European Sustainability Reporting Standard) des 12 normes thématiques de la CSRD, l’ESRS E1 se concentre spécifiquement sur les questions climatiques. Cette norme de reporting vise spécifiquement à renforcer et à harmoniser la transparence des informations divulguées par les entreprises sur :
- L’atténuation du changement climatique, c’est à dire les efforts fournis par l’entreprise pour freiner le changement climatique
- L’énergie, c’est-à-dire l’ensemble des formes de production et de consommation d’énergie de l’entreprise
- L’adaptation au changement climatique
L’ESRS E1 porte sur les questions climatiques et vise à améliorer la transparence des entreprises concernant l’atténuation du changement climatique, leurs pratiques en matière de production et consommation d’énergie, et leur adaptation au changement climatique.
Pour répondre à ce critère, la réalisation d’un bilan d’émissions de gaz à effet de serre et la définition d’une stratégie bas-carbone sont essentielles.
Quelles initiatives pour s’engager dans la lutte contre le changement climatique ?
Pour contribuer activement à la lutte contre le changement climatique, les entreprises peuvent débuter en évaluant leur impact, en réalisant notamment :
- Un Bilan Carbone, pour mesurer l’impact de l’organisation dans son ensemble
- Une analyse de cycle de vie de leurs produits ou services
Évaluer son impact
Bilan Carbone
Les entreprises françaises de plus de 500 salariés (250 salariés pour les entreprises situées en outre-mer) sont soumises à l’obligation réglementaire de réaliser un Bilan Carbone ou BEGES (Bilan d’Émissions de Gaz à Effet de Serre).
Avec l’entrée en vigueur de la CSRD, cette obligation s’étend progressivement aux entreprises remplissant deux des trois critères suivants : plus de 250 employés, plus de 40 millions d’euros de chiffre d’affaires ou plus de 20 millions d’euros de bilan total.
Lancée par l’ADEME en 2004, la méthodologie du Bilan Carbone® est portée depuis 2011 par l’Association pour la transition Bas Carbone (ABC). Cette méthodologie permet d’obtenir une photographie des émissions de Gaz à Effet de Serre (GES) d’une organisation sur une période déterminée -généralement une année fiscale ou calendaire) – en identifiant ses sources d’émissions, en les hiérarchisant, et en définissant des objectifs de réduction associés. Une fois réalisé, le Bilan Carbone devient un outil de suivi des actions mises en place pour réduire l’empreinte carbone de l’organisation.
ACV & Écoconception
A la différence du Bilan Carbone, qui évalue l’empreinte carbone d’une organisation sur une période déterminée, l’Analyse du Cycle de Vie permet de modéliser l’impact environnemental d’un produit, d’un service ou d’un processus, tout au long de sa durée de vie, aussi appelé « du berceau à la tombe ».
Cette méthode, telle que définie par les normes ISO 14 040 et 14 044, évalue les impacts environnementaux sur l’ensemble du cycle de vie, défini en cinq étapes clés.
Cette analyse multicritère permet d’obtenir l’impact du produit, service, ou processus étudié, sur différents critères, tel que le changement climatique, la raréfaction des minéraux, l’appauvrissement de la couche d’ozone ou le changement d’affectation des sols.
Elle permet d’identifier précisément les leviers d’écoconception à activer, tout en évitant les transferts de pollution entre différentes phases du cycle de vie.
Stratégie
Dans le cadre des obligations de reporting de la CSRD notamment, Les entreprises devront désormais partager leur plan de transition pour réduire les émissions, conformément aux exigences de la CSRD. Des cadres comme ACT pas-à-pas et des initiatives internationales telles que le CDP et la SBTi les accompagnent dans cette démarche. Bien que ces actions restent volontaires, elles sont de plus en plus demandées par les investisseurs et clients engagés dans la transition écologique.
Qu’est-ce qu’une stratégie climat et comment la réaliser ?
Une stratégie climat efficace repose sur l’intégration systématique des enjeux climatiques dans la stratégie globale de l’entreprise. Elle nécessite d’avoir au préalable réalisé le Bilan Carbone de cette dernière.
L’initiative ACT : Accélérer la transition climatique
L’initiative Assessing low-Carbon Transition (ACT), créée par l’ADEME, le CDP et la World Benchmarking Alliance, vise à évaluer et soutenir les entreprises dans leur passage à une économie bas-carbone. Elle propose des méthodologies spécifiques à chaque secteur pour aider les entreprises à aligner leurs actions climatiques sur des trajectoires ambitieuses et pertinentes.
Au cœur de cette initiative se trouve la méthode ACT pas-à-pas, conçue pour toutes les entreprises, quel que soit leur secteur ou taille, afin de construire leur stratégie bas-carbone. Elle repose sur cinq étapes : évaluation initiale de la maturité, analyse des risques et opportunités, engagement de l’entreprise, définition d’objectifs stratégiques, et mise en place d’un plan d’action.
Grâce à des outils pratiques, cette méthodologie permet aux entreprises de développer une stratégie bas-carbone cohérente, ambitieuse et conforme aux accords climatiques internationaux. Elle facilite également le respect des obligations de reporting de l’ESRS E1 de la CSRD, notamment la fixation d’objectifs de réduction des émissions et leur intégration dans une feuille de route de transition.
Quelles subventions ?
Parmi les dispositifs majeurs mis en place par L’ADEME, on y retrouve le programme PACTE Industrie, une initiative spécifiquement conçue pour accompagner les industries dans leur décarbonation en les aidant à concevoir et déployer une stratégie bas-carbone, avec la méthodologie ACT pas-à-pas.
Pour les entreprises non industrielles, l’ADEME propose également des subventions facilitant l’accès à un accompagnement ACT pas-à-pas, avec le Programme Volontaire Français (PVF) ou le programme Tremplin PME.
Initiatives internationales, supports à la décision
Les initiatives internationales telles que le CDP (Carbon Disclosure Project) et la SBTi (Science-Based Targets initiative) jouent un rôle crucial dans l’engagement des entreprises à l’échelle mondiale en matière de réduction d’émissions de gaz à effet de serre.
SBTi
La Science-Based Targets initiative (SBTi) permet aux entreprises de s’engager sur des objectifs de réduction des émissions basés sur des critères scientifiques, alignés sur l’Accord de Paris. Cette initiative, développée en partenariat avec le Global Compact de l’ONU et le WWF, fournit un cadre rigoureux permettant de définir des objectifs climatiques ambitieux mais réalisables. De nombreuses entreprises utilisent la SBTi pour valider leurs objectifs de décarbonation, garantissant ainsi la conformité de leurs engagements avec les recommandations scientifiques pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C ou 2°C.
Carbon Disclosure Project
Le Carbon Disclosure Project (CDP) est une organisation à but non lucratif qui encourage les entreprises à divulguer publiquement leurs données environnementales. Grâce à cette transparence, le CDP permet d’évaluer et de comparer l’impact des entreprises sur le climat, en donnant aux investisseurs et aux parties prenantes des informations claires et comparables. Cette démarche de reporting aide les entreprises à mieux comprendre leurs impacts environnementaux et à identifier les leviers d’amélioration tout en se conformant aux attentes des marchés financiers.
L’adaptation des entreprises au changement climatique : comment construire une stratégie résiliente ?
Il y a un peu de réglementation sur l’adaptation au changement climatique à date, mais le sujet gagne progressivement en importance, avec notamment une exigence sur le sujet dans l’ESRS E1.
Néanmoins, il en va de la viabilité future de l’entreprise dans un monde à 1,5°C voire 2°C : il est primordial que les entreprises françaises commencent à intégrer le sujet de l’adaptation afin d’anticiper les exigences futures de reporting national et européen.
La construction d’une stratégie d’adaptation requière de suivre trois étapes clés :
- Diagnostic : évaluer les risques et opportunités du changement climatique sur les activités de l’entreprise
- Stratégie : planifier des actions d’adaptation
- Évaluation et suivi : assurer une amélioration continue dans les actions entreprises
Biodiversité
La biodiversité est intrinsèquement liée aux changements climatiques. Les entreprises doivent intégrer la protection de la biodiversité dans leurs stratégies climatiques, en adoptant des pratiques respectueuses des écosystèmes. En ce sens, la CSRD requière de reporter un certain nombre d’informations dans le cadre de l’ESRS E4 « Biodiversité et Écosystèmes ».
Pour que les entreprises s’approprient ces sujets et évaluent leur niveau de maturité, l’ADEME et l’Office Français de la Biodiversité (OFB) développent actuellement une méthodologie ACT Biodiversité, en synergie avec leur programme Entreprises engagées pour la nature (EEN).
Pour toute question ou demande de renseignement,